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12 mars 2015 4 12 /03 /mars /2015 11:44

Après avoir étudié l'origine de notre Rituel, voyons ce que nous dit ce dernier à propos du déroulement de nos Assemblées.

Rituel - III... une pièce de théâtre ?

La Tenue est une cérémonie ordonnancée avec une extrême précision comme une pièce de théâtre, une tragédie antique, je dirais même une tragédie grecque, avec un texte, des acteurs, des costumes, un décor, une mise en scène, une scénographie.

 

La pièce que nous allons jouer ce soir

La Tenue va se dérouler en trois actes.

Avant le lever de rideau, la Loge est dans la pénombre.

Sur l'autel du Vénérable brille une veilleuse rouge  (élément fondamental du rite).

 

Acte ICréation de la Loge, sa sacralisation :

— premier tableau : fondation de la Loge par le premier coup de maillet accompagné de la formule "En Loge", illumination de celle-ci à partir de la veilleuse (moment symbolique fort) ; l'espace sacré est délimité par la déambulation du M. de C. ; le tableau de Loge est dévoilé ; le Volume de la Sainte Loi ouvert.

— deuxième tableau : les ténèbres sont maintenus hors de la Loge arme au poing (Loge couverte), vérification de l'absence de profane, d'intrus dans la Loge.

— troisième tableau : le temps devient sacré (à quelle heure..., quelle heure... ?), les travaux sont ouverts à la gloire du GADLU.

On y applaudit ! l'acte I s'achève par des acclamations (batterie, vivat...).

La Loge est devenue un espace sacré.

 

Acte II

1) admission d'un profane, moment majeur dans la vie maçonnique, cérémonie de passage des ténèbres à un espace sacré où règne la lumière :

— premier tableau : préparation du profane hors Loge, préparation de la Loge, ultime consentement de la Loge,

— deuxième tableau : introduction brutale du profane aveugle dans la Loge, passage sous le bandeau (1er temps), révélation du nom du parrain.

— troisième tableau : les trois voyages, purification par l'eau (2ème voyage), par le feu (3ème voyage).

— quatrième  tableau : passage sous le bandeau (2ème temps), question éthique (où est le bien ?), épreuve du sang, épreuve du calice d'amertume.

— cinquième tableau : obligation, sur le Volume de la Loi sacrée, devant le GADLU. Garder les secrets. Aimer ses frères

— sixième tableau : la fin des épreuves, la Lumière enfin accordée au Néophyte.

— septième tableau : remise du tablier (l'homme est condamné au travail), des gants blancs (honnêteté, pureté des actions), révélation des premiers secrets, le mot du maçon, les signes et attouchements, l'utilisation des premiers outils.

— huitième tableau, la Loge applaudit le nouvel Apprenti (acclamation), réponse de celui-ci, adresse de l'Orateur au nouvel Apprenti.

— neuvième tableau, instruction du grade, explication, par le deuxième Surveillant du Tableau de Loge.

 

Le nouvel Apprenti est alors placé au premier rang en tête de la colonne du Nord, place la plus proche de la pierre brute du pavé mosaïque.

Mais la cérémonie d'initiation n'est pas terminée, elle ne le sera qu'après l'intégration du nouvel Apprenti au sein de la Loge au troisième acte.

2) En l'absence d'une cérémonie de passage, lecture de l'instruction au grade d'apprenti et/ou présentation de travaux à la gloire du GADLU.

 

Acte III

Fin de la phase d'initiation par l'intégration du nouvel Apprenti, fermeture des travaux.

— premier tableau : point culminant de la Tenue avec la chaine d'union à mains nues, manifestation tangible de l'amour fraternel qui nous unit (phase spirituelle). Le nouvel Apprenti est  intégré dans la chaîne.

— deuxième tableau : circulation du tronc de bienfaisance, amour fraternel sous la forme d'espèces sonnantes et trébuchantes (phase matérielle).

— troisième tableau, arrêt du temps sacré, de ce fait l'espace de la Loge perd immédiatement son caractère sacré, déclaration de la fermeture des travaux.

On y applaudit par trois fois, extinction des feux, le tableau de Loge est caché aux regards de tous.

— sortie en cortège vers la Salle humide.

 

Rideau

La Loge est à nouveau dans la pénombre.

La veilleuse brille toujours.

 

à suivre...

Rituel - III... une pièce de théâtre ?

Enigme : Un Frère célèbre... difficile à identifier (une seule bonne réponse à ce jour)..

Voici quelques indices supplémentaires :

— où l'on découvre que la mer est... salée,

— mes œuvres sont exposées dans plusieurs très grands musées (Paris, Rome, Venise,...),

— Woody Allen, Paolo Conte, Tim Burton, Umberto Eco étaient de mes amis,

— J'ai vécu, entre autres, en Argentine; à Londres, en Suisse,...

— de l'Inutilité !

Rituel - III... une pièce de théâtre ?

685ème article

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RF BB T.V.F.B.B. - dans Rite Français
8 mars 2015 7 08 /03 /mars /2015 08:51

Dans l'article du 15 février, intitulé : « Rituel, en Franc-maçonnerie de quoi parlons-nous ? » nous avions essayé d'apporter quelques éclairages sur le sens du mot "rituel". Cet article est la première partie d'un travail présenté en Loge, sous le titre « Le Rituel ».

Voici la deuxième partie « D'où vient notre rituel ? », nous allons tenté de percé le mystère de son origine.

Rituel II -  Origine

D'où vient notre rituel ?                                                     

Sur la page de titre du rituel que nous utilisons, nous pouvons lire :

Rite français,

selon le Rituel de 1785 imprimé en 1801 sous le titre de

Régulateur du Maçon.

Cette formule est claire, sans ambigüité  sur notre filiation maçonnique. Mais elle mérite quand même quelques explications, qui nous permettront d'en savoir un peu plus sur l'origine de notre Rite.

 

Plongeant ses racines dans les sociétés de métiers, les guildes, les corporations, à la base de la Franc-maçonnerie opérative, la Franc-maçonnerie spéculative est née dans les Iles britanniques à la fin du XVIIème siècle.

Elle est apparue en Europe et en particulier en France, entre 1720 et 1725. Sous l'influence de britanniques, marins, commerçants, notables émigrés pour des raisons politiques ou religieuses, des Loges sont créées sur notre territoire.

Ces Loges travaillent  selon le rituel  en usage dans les Loges anglaises, c'est celui de la Grande Loge de Londres et de Westminster, première grande Loge créée  le 21 juin 1717, jour de la Saint Jean-Baptiste,  dans la Taverne l'Oie et le Gril, de l'union de quatre Loges.

Il faut se  rappeler qu'à cette époque le rituel est non écrit. Nous sommes sur la transmission strictement orale d'une tradition. Les Francs-maçons utilisent une technique particulière très ancienne, que l'on appelle l'art de mémoire (ars memoriae) qui s'appuie sur un ensemble de dessins, le Tableau de Loge.

Il faut attendre 1730 et les révélations de Samuel Prichard avec la publication de "La Maçonnerie disséquée" à Londres, pour disposer d'un rituel écrit complet. Cette divulgation sauvage fit scandale à l'époque, mais nous permet de découvrir des éléments fondamentaux du rite pratiqué :

— le mot du maçon,  J...

— disposition des colonnes (J coté nord)

— position du plateau du deuxième surveillant, au nord devant J,

— les trois grandes lumières (le soleil, la lune, le maître de la Loge),

— position des trois grands chandeliers (le soleil au Sud-Ouest, la lune au Nord-Est, le maître de la Loge au Sud-Est).

 

Au fil des années sur le continent, le rituel va subir diverses influences (philosophiques, religieuses, politiques, mythiques...) de la société française. Ces influences ne vont pas modifier les fondamentaux du rituel qui vont rester strictement conformes aux sources anglaises, mais vont agir sur la façon de mettre en œuvre les cérémonies, avec l'apparition d'un vocabulaire propre ne correspondant pas toujours aux mots anglais d'origine :

port de l'épée, création de l'office d'Orateur, déroulement des agapes...

 

Selon P. Mollier, le Rite Français est issu d'une alchimie subtile qui va unir les usages d'une maçonnerie opérative britannique et des éléments du patrimoine des anciennes sociabilités françaises.

D'autres divulgations nous permettent de suivre l'évolution du Rite au cours du XVIIIème siècle.

Quelques exemples :

— 1737, le rapport circonstancié du Lt général de police de Paris, René Hérault sur l'intégralité d'une initiation,

— 1744, Le secret des Francs maçons de l'Abbé Pérau,

— 1751, Le catéchisme des Francs-maçons de Louis Travenol (Léonard Gaba-non) illustré de gravures représentant l'initiation, l'élévation au grade de Maître et donnant de précieux renseignements sur tableau de Loge.

Toutes publications qui connaissent un grand succès auprès du public.

 

Dans le même temps la Franc-maçonnerie française s'organise

Elle se dote d'un Grand Maître en 1728, avec l'idée de s'affranchir de la tutelle britannique.

En 1735,  création de la première Grande Loge de France.

Un prince du sang, Louis de Bourbon-Condé, Comte de Clermont, en sera le Grand Maître de 1743 à 1771.

A la mort de ce dernier, la Grande Loge de France est réorganisée et devient le Grand Orient de France.

Le Grand Orient de France fait le constat de disparités dans les pratiques maçonniques et se préoccupe de la question des rituels. Il crée en 1773 une commission chargée de rédiger un rituel qui assure l'uniformité dans les travaux des ateliers symboliques.

Il faudra douze ans de travaux, de réflexions, de réunions, de rédactions, de palabres, de scrutins, pour aboutir enfin à une synthèse en 1785 (Apprenti le 15 juillet, Compagnon le 29 juillet, Maître le 12 août).

La période révolutionnaire va retarder l'impression pour une diffusion à l'ensemble des Loges.

Ce n'est qu'en 1801 que cette synthèse sera imprimée et réellement diffusée sous l'intitulé :

"Le Régulateur du Maçon".

 

Les Francs-maçons français disposent dès lors d'un rituel de référence dont les principaux auteurs (Millon, Graffin, Salivet et surtout Roettiers de Montaleau) ont veillé à ce qu'il soit fidèle au rituel de la Première Grande Loge de 1717.

Remarquons que le rite en question ne porte pas de nom.

 

A noter, la publication en 1788 d'un ouvrage de grande qualité, intitulé :

"Recueil des trois premiers grades de la Maçonnerie, Apprenti, Compagnon, Maître " par un ex Vénérable.

Ce recueil vraisemblablement réalisé au sein d'une seule Loge, reprend la synthèse de 1785 en l'enrichissant. Il a été peu diffusé et n'a pas eu d'impact sur les publications ultérieures.

Le Rituel que nous utilisons dans notre loge, descend en droite ligne du texte élaboré en 1785 et publié en 1901.

à suivre...

 

La bibliographie sera présentée à la fin de la dernière partie

Rituel II -  Origine

Énigme "Un Frère célèbre" :

Quelques nouveaux indices pour découvrir l'identité de notre F:. :

— Henri de Monfreid,

— Angoulême,

— mes aquarelles sont très recherchées. Une d'elle s'est vendue, aux enchères, plus de 100.000 euros.

Réponse par mail

Rituel II -  Origine
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RF BB T.V.F.B.B. - dans Rite Français
15 février 2015 7 15 /02 /février /2015 10:08
Rituel, en franc-maçonnerie de quoi parlons nous ?

Rituel :

adjectif, qui a trait aux rites, qui désigne ce qui constitue un rite,

substantif, nom masculin,  livre liturgique contenant les rites des sacrements.

Aucun doute le mot rituel est fortement ancré dans le religieux et nous renvoie par ailleurs systématiquement au mot rite.

Vérifions.

 

Rite :

— Cérémonie religieuse.

— Ensemble des prescriptions qui règlent la célébration du culte en usage dans une communauté religieuse, usages religieux.

                   Oui, je viens dans son temple adorer l’Eternel ;

                   Je viens, selon l’usage antique et solennel,

                                                                  Jean Racine, Athalie, Acte I scène 1

 

Toutefois, dans Trésor de la langue française nous découvrons ceci : par analogie, le mot rite est utilisé en Franc-maçonnerie ; suit une citation :

A propos de Cagliostro, n'a-t-il pas fondé un rite maçonnique particulier, le rite égyptien. Caron et Hutin, Les Alchimistes

 

Mais, en consultant l'Encyclopédie universelle, nous trouvons plus intéressant.

Ethnologie.

Rites, rituel, cérémonie de passage. Cérémonial qui, dans le déroulement d'une vie d'homme, marque la séparation entre une étape qui finit et une autre qui commence.

 

Ernest Renan utilise largement le mot rite dans un sens plus ethnologique que religieux en particulier dans sa leçon inaugurale au Collège de France en 1862.

Suit la citation  d'un ethnologue français (1873-1957) :

"Le rite en lui-même comporte trois moments : la séparation avec l'étape antérieure, la phase transitoire et périlleuse, la réintégration de l'individu dans le groupe".

"Arnold Van Gennep (1873-1957) Les Rites de passage" (1909)

 

Nous retrouvons là nos marques, le moment majeur de nos cérémonies étant celui du passage que ce soit l'initiation (au premier grade), le passage (au deuxième grade), l'élévation (au troisième grade) ou l'installation d'un nouveau Vénérable.

Sans revenir aux pratiques des sociétés archaïques étudiées par les ethnologues, les rites maçonniques permettent, au moment de l'admission d'un profane d'introduire celui-ci à la fois dans une communauté humaine, la Fraternité que constitue la Loge, et dans un monde de valeurs spirituelles, dans le cadre d'une relation au sacré particulière.

 

En Franc-maçonnerie, le rituel  est donc la mise en œuvre, strictement ordonnée, de l'ensemble des gestes, mots et symboles, qui constitue le cérémonial du déroulement  d'une assemblée maçonnique, ce que nous appelons une Tenue, au cours de laquelle, peut avoir lieu une cérémonie de passage.

Par extension le mot rituel désigne le livre dans lequel est transcrit ce cérémonial.

 

Sources : Emile Littré 4 vol., le Trésor de la langue française, Encyclopédie Larousse 6 vol., Encyclopédie universelle.

Rituel, en franc-maçonnerie de quoi parlons nous ?
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RF BB T.V.F.B.B. - dans Rite Français
6 février 2015 5 06 /02 /février /2015 11:49

Nous dirons quelques mots ce soir sur le Rituel utilisé à Trusatiles.

Voici ce que disait du Rite français Roger Girard, qui créa en 1979 la R:. L:. des Anciens Devoirs n° 238, première Loge travaillant à ce rite à la GLNF.

Rite français
Rite français

TVF BB - 679ème article

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RF BB T.V.F.B.B. - dans Rite Français
20 novembre 2014 4 20 /11 /novembre /2014 17:16
Le Bijou du Maître de cérémonie [IV]

Alors, cannes ou épées?

Vous l'avez sans doute compris, la logique historique et l'essence même de la Maçonnerie traditionnelle plaideraient pour que l'Office du Maître de Cérémonie se suffise de simples bâtons, cannes ou verges, comme on les nomme selon les divers Rites, qui les utilisent.

Mais la fréquentation, dès l'origine de la Franc-Maçonnerie moderne, de la noblesse (de robe et d'épée), de l'aristocratie et des officiers militaires, a modifié quelque peu le message initial. Et pour cela, divers arguments ont été appelés à la rescousse.

Bien sûr, en premier lieu, celui dont je vous ai déjà parlé, fondé sur la notion d'égalité, et surtout sur le fait que les adeptes francs-maçons, au moins continentaux, avaient le sentiment de former une sorte d'élite, qui ne pouvait se satisfaire de pratiquer "l'art royal" en simple quidam. C'est aussi pourquoi, des deux, puis trois degrés primitifs, nous sommes rapidement passés à 7, 9, 33 voire 99 grades, accompagnés des superlatifs et des titres les plus dithyrambiques, dont le seul intérêt est de flatter la vanité de leurs porteurs.

Mais, au moins pour les plus humbles et pour ceux qui croient au Ciel, le risque était grand de trouver l'alibi un peu faible. Aussi alla-t-on chercher des références bibliques, qu'il a suffi d'habiller de discours appropriés.

On convoqua ainsi, parmi les plus connues, l'Apocalypse de Saint Jean :

    " Puis je vis le ciel ouvert, et voici que parut un cheval blanc. Celui qui le montait s'appelle Fidèle et Véritable, et il juge et combat avec justice... Son nom est la Parole de Dieu…  De sa bouche sortait une épée aiguë, pour frapper les nations… Il avait sur son vêtement et sur sa cuisse un nom écrit: Roi des rois et Seigneur des seigneurs."(Ap.19;11-16)

Citons également l'évangéliste Saint Mathieu :

" Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre; je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. "(Mt.10;34)

A ce  propos, certaines traductions, selon l'euphonie de la phrase, alternent indifféremment les termes épée et glaive, sans que cela n'ait une véritable importance. En effet, en dépit de débats byzantins sur chacune des propriétés de ces deux armes blanches, elles sont néanmoins assez semblables, même si le glaive est considéré comme étant généralement plus ancien, plus court, plus massif, et peut ne pas avoir de garde.  (D'ailleurs reportez-vous aux fameux "deux glaives volés" du roi Jérôme, lesquels ressemblent à 2 épées!.)

Disons que par convention et distanciation, le glaive est devenu aujourd'hui une sorte de métaphore conceptuelle moins violente que l'épée, pour qualifier une forme de Pouvoir, fut-il républicain (le glaive de la Justice), religieux (le glaive de Dieu), littéraire (le glaive de la parole)…

Bref, d'un simple discriminant social et fortement symbolique, l'épée virile, pour ne pas dire phallique, avait pris au cours des âges une dimension sacrée, spirituelle et ésotérique. Et de nouveau, grâce à la Franc-Maçonnerie, l'arme meurtrière des puissants, des gentilshommes et des chevaliers redevenait ainsi un accessoire de Lumière (épée flamboyante), de Connaissance, de Justice et de Vérité, dans le droit fil, sans jeu de mot, des Ecritures.

(Genèse 3:24) C'est ainsi qu'il chassa Adam; et il mit à l'orient du jardin d'Éden les chérubins qui agitent une épée flamboyante, pour garder le chemin de l'Arbre de Vie…

(Ephésiens 6:17) Prenez aussi le casque du salut, et l'épée de l'Esprit, qui est la parole de Dieu.

Le Bijou du Maître de cérémonie [IV]

Nous pourrions encore multiplier les exemples, mais sans grand intérêt pour le lecteur.

Pour être honnête, je dois quand même ajouter, qu'il serait tout aussi facile de trouver des arguments pareillement bibliques concernant la verge, la baguette ou le bâton, depuis celui de Moise, en particulier dans l'épisode le plus spectaculaire:

(Exode 14:16) : "Toi, lève ta baguette, étends ta main sur la mer, et fends-la; et les enfants d'Israël entreront au milieu de la mer à sec".

En passant par Aaron,

(Nbres 17; 23) " Le lendemain, lorsque Moïse entra dans la tente du témoignage, le bâton d'Aaron, pour la famille de Lévi, avait fleuri. Il avait bourgeonné, donné des fleurs et des amandes." Et encore une fois, jusqu'à St Jean avec lequel il mesure la Jérusalem Céleste.

(Ap. 11;1) "On me donna un roseau semblable à une verge, en disant : Lève-toi, et mesure le temple de Dieu, l'autel, et tous ceux qui s'y trouvent".

Epées et bâtons trouvent donc leur légitimité selon le courant qui les porte.

 

Mais, si la représentation symbolique des bâtons ne pose pas de grandes difficultés, ne serait-ce qu'en copiant les armoiries anciennes, il en va tout autrement pour ce qui concerne les épées qui peuvent prendre d'innombrables postures.

Pointe en l'air ou pointe en bas?

Evidemment, vous vous doutez bien, selon les points de vue et les arguments, que deux écoles s'affrontent.

Les tenants de la tradition héraldique et chevaleresque défendent l'idée que l'épée, même symbolique, demeure une arme, et que celui qui en est doté doit l'honorer et l'utiliser comme telle. C'est pourquoi doit-elle être représentée pointe en l'air, dans une attitude, sinon offensive, au moins de défense contre n'importe quel "ennemi", y compris soi-même. C'est l'image la plus commune que l'on retrouve dans n'importe quelles armoiries, dès lors que rien d'autre n'est précisé.

Mais ces épées, qui ont traversé les siècles et ont participé à faire la fortune et le malheur d'innombrables familles, y compris parmi les plus prestigieuses, ont fini par exprimer sur les écus un langage complexe, selon qu'elles sont rangées de multiples manières, en pal, en bande, en sautoir, en fasce…, et surtout, jusqu'à être représentées parfois la pointe en bas, c'est à dire dans une attitude jugée passive, exprimant le renoncement ou la défaite.

Evidemment, ceci n'est pas acceptable pour un franc-maçon… spéculatif. (Je pense à cet instant à divers ouvrages maçonniques qui, à tout prendre, préfèrent des bâtons pour insignes, plutôt que des épées pointes en bas !)

Et pourtant.

Il suffirait seulement de trouver la bonne interprétation pour qu'une telle disposition, a priori peu reluisante, devienne soudainement lumineuse.

Essayons.

D'abord observons que longtemps, les épées classiques médiévales, avec leur garde droite, ont revêtu une symbolique fortement cruciforme, laquelle est plus facile à lire avec la pointe en bas.  C'est ce que suggère par exemple St Bernard de Clairvaux, dans son règlement aux Templiers : " l’épée est tout pour vous, et plus que la Croix. Elle est la forte image brûlante du Verbe qui s’est incarné parmi nous pour nous sauver. N’oubliez pas que vous portez sur votre flanc la Lumière de notre Seigneur … non par colère, mais pour détruire la nuit de la mécréance des infidèles et que triomphe la Vérité apportée par le Christ."

D'autre part l'épée nue, pointe en bas, est considérée comme le symbole de la Justice, qui pardonne aux faibles et aux repentants. (Didron. Annales archéologiques, t. xx, p 72). Mieux, il semble que lorsqu'il y a deux épées nues avec les pointes en bas elles symbolisent, plus précisément encore, les deux aspects de la Justice idéale, à savoir, 

 - l'une, à la pointe émoussée, représente le pouvoir spirituel, la décision parfaitement juste qui n'a nul besoin de la force ou de la violence pour s'accomplir;

 - l'autre, à la pointe très acérée, est l'emblème du pouvoir séculier, transitoire, vengeur et perfectible.

Or, à l'encontre d'interprétations très douteuses (y compris lorsqu'elles tentent de commenter la présence des bâtons), et qui méconnaissent totalement l'origine de l'Office du Maître de Cérémonie, ce n'est pas parce qu'il y a deux Maîtres de Cérémonie au Rite Français, que pour autant nous avons les deux épées en sautoir, mais bien davantage pour cette double filiation, spirituelle et temporelle. En effet, le Maître de Cérémonie qui met "les choses en ordre", et "place les hommes selon leurs rangs", accomplit ainsi un acte qui s'inscrit, d'une certaine manière, à la fois dans le plan divin et dans la justice humaine.

Mais tout ceci demanderait encore trop de pages d'explications, et pour mettre un terme, provisoire (car beaucoup d'autres que moi reviendront sur ce sujet), à cette courte étude, je vais conclure par un sentiment personnel et une anecdote légère.

 

Les "Honneurs Maçonniques".

Je profite de ce travail sur le Maître de Cérémonie, pour exprimer mon sentiment personnel à propos d'un passage du Rite Français de 1785, "selon le régulateur du maçon" de 1801.

Ce dernier comporte, dans son rituel ordinaire au 1er degré, un moment très original, nommé "les Honneurs Maçonniques". Ce court épisode, qui pourrait être conforme à son titre, s'il se déroulait correctement, est devenu aujourd'hui, par ignorance, un instant complètement stupide de la Tenue, et se trouve totalement dévoyé de sa vocation d'origine. En effet, à partir de l'instant où la grande majorité des pratiquants ne sait rien de la provenance historique de la charge du Maître de Cérémonie, la séquence dite des "Honneurs Maçonniques" est alors vécue comme une sorte de pensum incongru, inutile et redondant, puisqu'il conduit, à chaque Tenue, le VM en Chaire à "rabâcher", aux FF visiteurs, qui ignorent tout de cette procédure bizarre, en quels termes ils doivent se présenter à l'ensemble de la Loge. On assiste alors à un exercice laborieux d'autojustification de se trouver là qui, bien des fois, par maladresse, s'assimile à une présentation calamiteuse des salutations avant la lettre. Or, cette procédure, fort mal comprise, mal exécutée et donc mal écrite par nos éminents rédacteurs, répond, en fait, à l'une des attributions fondamentales du Grand Maître des Cérémonies de France, ou plutôt de ses assesseurs.

En effet, à l'occasion de réunions importantes, de dîners d'apparat, de manifestations officielles et autres moments notoires de la Royauté, il était d'usage qu'un Maître de Cérémonie, commis du Grand Maître des Cérémonies de France, annonce clairement, à haute et intelligible voix, les noms, titres et qualités des invités ou visiteurs de marques, afin qu'ils soient honorés comme il convient, et reconnus pour tels par la brillante assemblée des participants.

Aujourd'hui encore, sous le titre d'huissier ou de portier, cette très ancienne fonction de nomenclateur, annonceur, crieur et plus trivialement "aboyeur", continue à exister sous les ors même de la République. (cf. huissier audiencier qui annonce dans les tribunaux "la Cour !", l'huissier à chaînes, qui précède le Président de la Chambre des Députés en criant "Monsieur le Président de l'Assemblée", …)

Quant à notre 2ème Maître de Cérémonie, cela n'étonne personne qu'il annonce l'entrée du "VM et de ses Surveillants!", mais il n'est venu à l'idée de quiconque de présenter les visiteurs de cette manière…. Bizarre, ne trouvez-vous pas ?

C'est pourquoi, durant mes deux années de Vénéralat, je n'avais fait aucune révolution en remettant seulement cette tradition en usage. Par conséquent, je faisais présenter nos FF visiteurs, (qui se mettaient debout à l'appel de leurs noms), dûment tuilés, par le 1er Maître de Cérémonie qui leur rendait alors, sans bredouiller, et au nom de toute la Loge, de réels "Honneurs Maçonniques", dont certains me dirent sur les parvis leur reconnaissante satisfaction ! L'ordre de préséance allant, comme toujours en Maçonnerie, en ordre inverse du numéro de Loge, et à l'intérieure de celle-ci, de l'Apprenti au TRF, selon le n° d'ordre de leur matricule; c'est à dire que le plus éminent F de la plus ancienne Loge est toujours cité en dernier.

Hélas cette Tradition, quasi inconnue, est retombée dans la routine fautive du rituel officiel… faisant perdre encore un peu plus le sens profond du pourquoi les choses sont faites ainsi, et pas autrement. Dommage.

 

En rang d'oignon(s).

Pour finir sur une note plus légère je vais vous conter une histoire tellement séduisante qu'elle ne peut qu'être vraie…

A la fin du 16ème siècle, un certain Artus de La Fontaine-Solaro, baron d'Oignon, était chargé d'organiser les cérémonies royales avant même que la charge de Grand Maître ne fut créée officiellement en 1585 par Henri II. Passé néanmoins Maître dans l'art du protocole, il avait acquis, durant de longues années, une telle expérience pour ranger les invités selon leurs titres, leurs mérites, leurs inimitiés et autres facteurs discriminants, qu'il parvenait de surcroît à faire en sorte que les rangs formés soient esthétiquement agréables à l'œil du Roi. Mais pour que l'ensemble, souvent disparate en taille, couleur et présentation, soit le plus homogène possible, il avait pris l'habitude de serrer vivement les convives les uns contre les autres, lesquels évidemment se plaignaient, chaque fois que le Baron officiait, d'être ainsi placés en "rang d'Oignon". Et l'expression resta, jusqu'à nos jours, où l'on devrait dès lors écrire "oignon" sans s, voire avec une majuscule.

Le Bijou du Maître de cérémonie [IV]

Certes l'histoire est belle, mais, selon nos plus éminents lexicologues (Alain Rey et autres) ce n'est qu'une réécriture tardive de la réalité. En effet, cette expression désignait, à l'origine, les personnes qui se trouvaient en un lieu sans y avoir vraiment été invitées. Dès lors, ne répondant à aucun titre de préséance établie, ces gens étaient rangés seulement par ordre de taille, du plus petit au plus grand, exactement comme dans une tresse d'oignons, d'ails ou d'échalotes… (quoique aujourd'hui où tout doit être calibré, il n'est plus question de mélanger les petits et les gros).

Comme quoi, il faut se méfier des interprétations les plus alambiquées, qui ne sont souvent fondées que sur pure imagination.

 

T:. V:. F:. Alain V:.

Le Bijou du Maître de cérémonie [IV]
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RF BB TVF AL - dans Rite Français
12 novembre 2014 3 12 /11 /novembre /2014 22:22

A la page 31 de :

Décors & Usages à l'intention des membres de la Grande Loge Nationale Française, éditions GLNF 2002,

les bijoux des Maîtres de Cérémonie sont figurés ainsi :

 

Le Bijou du Maître de cérémonie [réf. biblio]

*

*         *

Article du 8 novembre dernier, vous avez corrigé bien sûr, l'auteur de la citation est bien Amélie Nothomb.

Le Bijou du Maître de cérémonie [réf. biblio]
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RF BB T.V.F.B.B. - dans Rite Français
8 novembre 2014 6 08 /11 /novembre /2014 18:18

Voici, comme promis, le troisième épisode, mais... ce n'est pas le dernier ! Il y aura donc une quatrième partie.

Le Bijou du Maître de cérémonie [III]
Le Bijou du Maître de cérémonie [III]

Nous venons de voir, au cours des deux épisodes précédents, que les bâtons, les cannes et les épées, se justifient plus ou moins logiquement, selon que l'on s'attache à la tradition monarchique ou à la conquête révolutionnaire, et d'ailleurs ceci, par de curieuses interversions du sens de l'Histoire.

Mais disant cela, vous conviendrez aussi que nous nous sommes contentés, jusqu'alors, de nous appesantir sur la seule surface des choses, puisque nous n'avons fait que décrire et expliquer une vulgaire babiole, une épinglette de bazar, dont les attributs ont la fâcheuse tendance de se modifier avec les époques, les modes, les rituels, les obédiences et les directives circonstancielles de personnages en cour.

Or, si je comprends fort bien que l'iconographie peut avoir une certaine importance pour soutenir la pensée, la foi ou le raisonnement des adeptes, il n'en demeure pas moins vrai que c'est à partir de la doctrine, des principes et des préceptes, et mieux encore par des exemples, que l'on peut véritablement fonder une démarche originale, une nouvelle façon de voir le monde et de se comporter avec ses semblables. Et, de la même manière que ce n'est pas l'habit qui fait le moine, ce n'est pas non plus le triangle qui fait la Maçonnerie, ni même le tablier qui crée le Maçon, et encore moins l'insigne qui justifie le Maître des Cérémonies...

Aussi devons-nous faire l'effort de "sortir de la caverne" platonicienne, même s'il nous en coûte davantage aujourd'hui, où nous sommes confrontés à un quotidien continûment mis en "spectacle". En effet, c'est en quittant le monde des apparences, des colifichets, de la verroterie, du brouhaha, de l'insignifiance, et donc en entrant dans l'intime de nos propres convictions et au plus profond du réel de notre existence, que nous pourrons apercevoir des réponses quant au pourquoi de notre présence au monde. Par conséquent, il me semble indispensable, au-delà de la médaille, du cordon ou des oripeaux attachés à telle ou telle fonction, d'aller explorer ce qui donne vraiment sens à cette charge de Maître des Cérémonies.

Aussi revenons aux fondamentaux, comme on dit en "ovalie"…

 

 

Le Bijou du Maître de cérémonie [III]

Le Grand Maitre des Cérémonies de France.

 

Historiquement, le Grand Maitre des Cérémonies de France, que nous avons aperçu brièvement au début de ce travail, était l'héritier de fonctions royales prestigieuses, certes, mais il avait surtout une vocation "administrative et protocolaire" dirait-on aujourd'hui.

Alors pourquoi, soudain, cette rupture dans les usages de la royauté?

Une fois encore, il va nous falloir faire un peu d'histoire.

Même si, depuis la Révolution française, nous avons tendance à mettre sous le même vocable générique "d'Ancien régime" environ 1000 ans d'Histoire très diverse, il faut bien voir que jusque vers la fin du 15ème siècle, la royauté s'exerçait, en France, au sein d'un entourage restreint, de proches, de conseillers et d'amis, loin de toute idée de cour. Et, si "C’est bien François 1er qui institua les premiers rudiments d’une étiquette, celle-ci demeurait bon enfant. La cour de François 1er était marquée par les derniers reflets de l'âge de la Chevalerie, c'est-à-dire que le Roi n'était que le premier de ses gentilshommes et restait accessible à tous. Les gentilshommes présents à la Cour étaient davantage des compagnons d'aventures que des flatteurs enrubannés" (d'après Marie-Lan Nguyen, Mémoire de Maîtrise Université Paris-IV Sorbonne. 1999).

Sous Henri II, Catherine de Médicis tenta de mettre en place une étiquette un peu plus stricte, mais qui ne put s'établir durablement, en raison des troubles intérieurs et des guerres de religion, qui mettaient le royaume à feu et à sang. Ainsi, sous Charles IX, par exemple, les appartements du roi étaient quotidiennement envahis par une populace de rustauds, d'intrigants, de curieux et de courtisans, dont l'insolence le disputait à la grossièreté.

C'est pour remédier à cette pétaudière, qu'Henri III, par son aversion du désordre, nomma en 1585 un Grand Maître des Cérémonies de France et organisa la Maison du Roi de telle sorte qu'on ne laisse plus " les particuliers juges des égards qu'ils voudraient avoir, et des devoirs qu'ils auraient à rendre : le bon ordre, la philosophie même, et par conséquent la justice, ont obligé d'établir des règles de subordination. En effet, il serait très dangereux dans un État de laisser avilir les places et les rangs,… sans quoi le caprice, l'envie, l'orgueil et l'injustice attaqueraient également les hommes les plus dignes de leurs rangs." (d'après Nicolas Viton de Saint-Allais. 1816)

Cette notion d'étiquette allait sans cesse se préciser au cours de l'Histoire, et trouva son apogée sous le règne de Louis XIV, dont Saint-Simon affirme que même "à trois cents lieues de Versailles, et avec une bonne montre et un almanach, on pouvait savoir précisément ce que faisait le Roi à telle ou telle heure". Pour fixer les esprits, retenons que les courtisans étaient environ 3000 à Versailles et dans les alentours, mais pouvaient être jusqu'à 10000, à certaines périodes et pour certaines occasions ! Et tous devaient suivre avec précision l'étiquette du Château, sous peine de disgrâce.

 

Alors, quel était le rôle de cette nouvelle charge royale?

Il s'agissait, bien avant notre folie moderne de "spins doctors et autres experts communicants façon doreurs de pilules, d'organiser le prestige de la royauté, de mettre en scène le pouvoir et de faire du monarque, à la fois un personnage public et un homme différent des autres. Ceci dans le droit fil de la tradition médiévale de la double nature du Roi, (cf. l'ouvrage sur les "Deux corps du Roi" d'Ernst Kantorowickz) l'une mortelle et humaine, l'autre souveraine et éternelle. C'est ainsi qu'aux funérailles du Roi de France, lorsque toutes les solennités étaient terminées, le Grand Maître des Cérémonies, illustrant l'achèvement et la continuité, brisait son bâton de commandement, et le jetait dans la tombe en répétant par trois fois :

"le roi est mort, vive le roi !"

Car c'est un des paradoxes de cette fonction qui, en mettant en place un faste omniprésent et très codifié, aura permis de sacraliser certains évènements purement laïcs, faisant perdre ainsi, sans doute involontairement, dans ce domaine spécifique, le privilège exclusif détenu jusqu'alors par l'Eglise. En effet, les baptêmes, les mariages, les sacres, les offices funèbres ont continué de répondre aux exigences de la liturgie, mais ils intègrent désormais tout un décorum périphérique, qui n'a plus rien de religieux. A cela s'ajoutent les moments les plus divers de gouvernance et du quotidien du Roi, depuis la réception des ambassadeurs, les lits de justice, les entrées et départs des Princes, des puissances étrangères, en passant par le coucher et le lever du Roi, les banquets royaux, les chasses, mais aussi les déplacements de la cour, l'organisation des fêtes, jusqu'à l'ordre des préséances, des détails vestimentaires, des salutations, etc… Chaque heure, chaque journée du Roi, chaque saison, chaque tâche particulière, chaque action jusqu'à la plus intime fait l'objet d'un cérémonial de plus en plus exigeant, qui place la personne du Roi sur une sorte d'espace-temps inaccessible et quasi divin, en même temps qu'il l'emprisonne dans un carcan de formalisme de tous les instants.

Mais à bien y réfléchir, la République n'a pas changé grand-chose, en dehors des justaucorps, des perruques et des chapeaux à plumes, puisque même les chevaux de la Garde Républicaine participent au décor. Et si l'on ajoute à cela, aujourd'hui, les réseaux dits sociaux, les paparazzis, l'information en continue, la pompe élyséenne et la sécurité des VIP, les avions et les hélicoptères, les véhicules à gyrophares et les limousines à vitres teintées, les gardes du corps et les forces de l'ordre, sans oublier les sempiternels conseillers en tout et en image et les troupeaux de journalistes accompagnant le Chef de l'Etat, on voit que le cérémonial républicain n'a rien à envier aux équipages royaux de la Cour, et fait du Président de la République un homme presque "normal" quant à ses humeurs, exceptionnel quant à son quotidien et néanmoins constamment otage de ses propres servitudes.

Mais revenons à notre affaire.

 

 

Le Bijou du Maître de cérémonie [III]

Le Maître de Cérémonie.

 

Le Maître de Cérémonie de nos Loges, est en quelque sorte lui-même, qu'on le veuille ou non, le descendant maçonnique de la fonction royale, que nous venons de décrire très succinctement.

Peut-être m'objecterez-vous, pour mettre en avant, chez nous, l'originalité de cet Office, que nous y attachons, en plus, une dimension fortement symbolique, sans équivalent ailleurs. 

En êtes-vous si sûrs?

La différence, à mon avis, ne se fait pas tant sur la symbolique, mais bien plutôt sur les discours que l'on tient à son égard.

En effet, quel est le rôle de notre Maître de Cérémonie?

Si son domaine, heureusement plus restreint, est exclusivement le périmètre d'une Loge, il n'en est pas moins, et avant tout, le metteur en scène et l'accompagnateur du Rituel qu'il doit, évidemment, parfaitement connaître. Dans tous les rites, où cette fonction existe, c'est le Maître de Cérémonie qui est à la charnière de l'harmonie générale, de la fluidité de la gestuelle, de la synchronisation des rôles, de la place de chacun, de l'égrégore collective. Il est celui qui met en ordre les choses, "ordo ab chao", comme on dit au rite écossais.

S'il connait bien sa charge et l'estime à sa juste valeur, le Maître de Cérémonie doit alors la pratiquer avec solennité et sérieux, d'un pas assuré et calme, en marquant la régularité de sa progression d'un léger coup de canne au sol. C'est lui qui veille à ce que chacun soit placé en Loge selon son rang, et non au gré des états d'âme de chaque participant. C'est lui aussi qui organise les salutations et hommages lors de l'installation du nouveau VM. C'est lui encore qui est responsable des "accessoires" indispensables pour que la Tenue se déroule sans incident, et atteigne son but spirituel. C'est toujours lui qui donne l'entrée en Loge et en organise la sortie. Ainsi doit-il (devrait-il), s'assurer que chaque Officier connait parfaitement son rôle, et faire en sorte de travailler en parfaite complémentarité avec l'Expert, le Couvreur, l'Organiste (quand il existe), ainsi que tout participant qui aurait à intervenir en cours de séance.

Des bougies jusqu'au tableau de Loge, des téléphones portables (hélas) jusqu'à la pipe à lycopodes, du titre de chaque visiteur jusqu'aux cordons des Officiers, rien ne doit échapper au regard pointilleux du Maître de Cérémonie, afin que le rituel soit accompli sans heurt. Au sein de la Loge, il est le seul à pouvoir circuler en solitaire et nul ne se déplace sans être accompagné par lui, (pas même un TRF du 33ème étage). Oui, mais voilà…

Bref, sa fonction cérémonielle, toutes proportions gardées bien entendu, emprunte aux mêmes sources que celles que pouvait tenir auprès du Roi, le Grand Maître des Cérémonies de France. A ceci près, effectivement, que nous allons plus loin, trop peut-être, dans l'exégèse maçonnique et l'herméneutique ésotérique.

Un exemple :

Je lis dans divers ouvrages et planches, maintes fois recopiés et caviardés des uns sur les autres, que (je traduis et simplifie)  "Maître du Rituel, le Maître de Cérémonie aménage l'espace-temps du Nadir horizontal(?), en complémentarité avec l'Expert qui s'occupe du plan vertical. Quand l'un entrebâille la porte du Ciel, l'autre l'ouvre largement aux initiés… Grâce à lui les deux plans sont reliés, car il connait l'ordre cosmique et sa représentation géographique sur terre, laquelle projetée à l’intérieur du Temple participe à l'essor des ondes positives devant conduire à l'Egrégore universelle…" Et je ne vous parle pas des sefirots ni des influences zodiacales…

Or, avons-nous besoin de tels amphigouris pour mener à bien, tout simplement mais pleinement, la mission que nous confie le Vénérable en chaire?

 

(Suite et fin au prochain numéro)

Le Bijou du Maître de cérémonie [III]
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RF BB T.V.F.B.B. - dans Rite Français
26 octobre 2014 7 26 /10 /octobre /2014 15:32
Le Bijou du Maître de cérémonie [II]

Pourquoi des épées?

Nous avons vu dans la 1ère partie, grâce à des références historiques précises,

— D'une part, pourquoi le "Maître des Cérémonies" utilise généralement une canne pour assurer son office;

— Et, d'autre part, la raison pour laquelle son emblème est constitué de deux éléments en sautoir, même lorsqu'il n'existe qu'un seul officier représentant cette charge dans un rite donné.

— Enfin, nous avons aussi obtenu des précisions quant à la décoration traditionnelle de la canne du Maître des Cérémonies.

Mais alors, me direz-vous, pourquoi soudain deux épées?

Comme je l’ai déjà suggéré dans le 1er épisode, ce ne fut pas toujours le cas, et ce ne l'est pas partout. En outre, il semble que cette représentation est sujette à changements plus ou moins cycliques et opportuns, sans que l’on sache trop pourquoi ces modifications ont lieu. J’ose espérer que ce n’est pas pour de simples raisons d’intérêt de quelque marchand du Temple…

Mais qu’importe, l’homme étant capable de justifier en tout temps ses actions, y compris les plus injustifiables, commentons donc ce qui nous est donné à commenter en cet instant.

D’abord retenons que tous les rites, qui reconnaissent la charge de Maître des Cérémonies, même si elle ne se nomme pas toujours ainsi, croisent, en croix de St André, on dit aussi "en sautoir" en héraldique, des épées ou des cannes, ceci en parfaite imitation de ce que furent les emblèmes des charges royales ou militaires, dont nous avons parlés précédemment. Mais, raison aidant, vous conviendrez qu'il eut été difficile de reprendre à l’identique ces glorieuses armoiries historiques, sans risquer de se faire regarder comme de pauvres nobliaux d’opérette affublés d'un orgueil démesuré, ostentatoire et finalement usurpé. Donc les cannes des pendentifs ne sont pas tout à fait semblables aux bâtons armoriés.

Le Bijou du Maître de cérémonie [II]

Restent les épées.

Ici il va nous falloir à nouveau croiser, si j'ose dire, nos regards entre l’Histoire et la Maçonnerie, et oublier les explications "symbolo-fantaisistes", qu'on peut lire ici ou là, concernant, entre autres, les "dangers" que pourrait rencontrer pendant ses circumambulations le Maître des Cérémonies ! Ou alors c'est à se demander à quoi servent tuileurs, couvreurs et experts…, et même quelle est l'utilité d'une "ouverture des travaux" en bonne et due forme?

Mais revenons à nos épées.

Vous vous souvenez qu’au 17ème siècle, et durant des décennies, l’Angleterre fut le théâtre d’une véritable guerre civile, qui laissa un traumatisme profond dans les consciences. Aussi, lorsque se créa la Franc-Maçonnerie contemporaine en 1717, les souvenirs sanglants étaient encore vifs, et les instigateurs de cette nouvelle vision du monde recherchaient avant tout à construire une Fraternité universelle d'intelligence et de concorde. Ce qui n'empêcha pas, au moins dès 1751, les nouveaux Francs-Maçons anglais de s'affronter, parfois violemment, entre "Anciens" et "Modernes" pendant encore plus de 60 ans. Alors, quand vint enfin la réconciliation maçonnique de 1813, tout fut organisé pour que la paix puisse régner durablement sur nos colonnes. Oralité des travaux, interdiction d’aborder des sujets qui fâchent, reprises d’anciens usages, accommodements entre Anciens et Modernes, foi en une Transcendance plus ou moins révélée, tolérance relative, etc…Tout ceci devant contribuer à arrondir les aspérités. C’est pourquoi, tous les rites purement anglais n’introduisaient jamais la moindre arme, et surtout pas l’épée, dans leurs Loges. (Je ne sais trop si cela est partout suivi aujourd'hui). La seule exception, qui confirme la règle, étant les courts instants, lors de l’installation du VM, où ce dernier reçoit le Tuileur avec son épée et la lui remet rituellement, pour qu’il aille immédiatement se faire voir ailleurs, et siéger au dehors de la Loge. Celui-ci, gardien de la porte, devient alors le seul garant, armé, de la sécurité intérieure des LL anglaises.

Mais en France il en alla autrement, ne serait-ce que par esprit de rupture avec la maçonnerie, non seulement anglaise, mais surtout anglicane.

Et ce, d’autant plus que chez nous, pour reprendre une pensée gaullienne un peu désabusée, le désir d’égalité va, paradoxalement, de pair avec l’envie des privilèges. Aussi, par un étrange souci de nivellement par le haut et de parité aristocratique, nous fallait-il porter l’épée au côté, en gage de liberté et de noblesse… au moins de cœur. Toutefois, pour ne pas sombrer dans le ridicule, car il ne s’agissait évidemment pas de singer l’Ancien Régime chancelant et inégalitaire, on tenta d'expliquer que nos Loges traitaient de manière semblable tous leurs membres, fussent-ils nobles, militaires ou roturiers. Et comme l'explication risquait d'être un peu courte, on estima opportun de suivre les théories très contestables du sieur Ramsay, lequel nous a relié sans preuve à la Chevalerie templière, dont on nous recommande d'imiter au moins l'esprit, sinon les prérogatives. C'est ce que rappelle, par exemple, et avec force, l'Ordre de la Stricte Observance Templière.

Il n’empêche, aujourd'hui, que le fait est là, certains accessoires militaro-chevaleresques, se sont avérés indispensables pour pratiquer la Maçonnerie, y compris certains déguisements, sans compter les "hauts grades", inconnus de la Maçonnerie anglaise. Et c’est ainsi que divers rites "continentaux", comme le RER, le Français et quelques autres étrangers, portent noblement l'épée au côté, et en dotent abondamment leurs Officiers. Mais plus nombreux encore sont les rites et les LL qui, bien que ne portant pas l'épée, mais désireux d'honorer quelque plénipotentiaire, se dépêchent à former la "voûte d'acier", dont l'origine est toutefois purement militaire, sans être nécessairement chevaleresque.

Forts de ces arguments, on comprend mieux pourquoi il n'est pas question, suivant l'essence même de certains rites, de mettre en sautoir de vulgaires cannes. Et pourtant, comme on l'a vu plus haut, le bâton, qu'il ne faut certes pas confondre avec le sceptre, reste le symbole de l'administration civile ou religieuse et caractérise aussi la plus haute distinction militaire, le maréchalat, dont le bâton d'azur est semé aujourd'hui, non plus de fleurs de lys, mais  d'étoiles d'or.

A suivre…

Le Bijou du Maître de cérémonie [II]
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