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Le voyage est un déplacement du corps dans le temps et l’espace. Ce déplacement physique fait participer l’esprit et l’âme aux découvertes effectuées par les sens.

Il peut être effectué dans un petit périmètre mais ouvrir de nouveaux et grands horizons à l’esprit et à l’âme. Le premier voyage parait correspondre à ce type de déplacement. Il s’inspire de la tradition opérative compagnonnique. Un voyage pourra enfin n’être accompagné d’aucun déplacement géographique et donc purement spirituel mais permettre l’élévation infinie vers la lumière. Ce voyage que l’on pourrait qualifier d’idéal ou de parfait n’est-il pas la quête de tout maçon ?

 

Pour ce qui concerne le premier voyage il s’effectue en aveugle donc privé de l’un des principaux sens et dans une attitude de grande modestie mais aidé par des protecteurs bienveillants et éclairés.

La privation de la vue permet d’exacerber les autres sens et de  ressentir avec plus d’acuité les sons, les bruits, les obstacles physiques, les difficultés et irrégularités de la progression dans l’espace.

La marche se fait courbé vers l’avant comme écrasé par son passé ; la marche doit être humble comme doit l’être le néophyte qui va demander la fraternité et la lumière.

La région du cœur et le genou droit à nu, le pied gauche sans chaussure sont autant de symboles d’ouverture, de sincérité de la recherche et de respect du sacré.

Il s’agit d’abord de la marche voutée de celui qui regarde la terre d’où il vient de remonter dans le cabinet de réflexion, V.I.T.R.I.O.L implique la mise en œuvre du « connais-toi toi-même » de Socrate, une remise en cause des acquis et une rectification qui doivent aboutir à retrouver sa vraie place dans l’univers. Il s’agit également de rechercher le juste équilibre entre le corps et l’esprit.

 

Cette position voutée peut être rapprochée de celle du vieillard qui, exténué par son voyage dans les entrailles de la terre, immense déplacement symbolique, va mourir pour mieux renaitre sur le chemin de la lumière.

Dans la tradition juive une histoire raconte la descente de trois hommes dans le royaume des ténèbres : le premier revient dément, le second aveugle et le troisième, un rabbin qui a dit qu’il s’était rencontré lui-même, indemne.

Cette attitude symbolise également la question à laquelle l’apprenti devra trouver une réponse par son travail : d’où venons nous ?

Cette position doit enfin  permettre de se relever progressivement en se libérant et en se purifiant.

 

Le premier voyage, l'expression laisse entendre qu'il y en aura d'autres mais également qu’il s’agit de celui dont on ignore tout, le plus risqué celui qui doit permettre de se dévoiler et de se révéler à soi-même, de découvrir les exigences de la nature humaine. Il démarre de l'Occident (domaine des faits de la réalité objective du monde sensible) passe par le Septentrion (sombre forêt ou Dante se trouve au tout début de la Divine Comédie et dans laquelle, selon Virgile,  Enée devra cueillir  le rameau d’or qui lui procure l’accès des Enfers*), puis par l'Orient (le domaine de l’abstraction, de la réalité subjective), retour vers l’Occident par le sud .

Au cours de ce voyage il faut gravir une montagne abrupte qui, à peine franchie, cède sa place à un orage violent, souffle puissant d’air, qui entraine et précipite le voyageur vers son lieu de départ tout en le purifiant. C’est peut être à ce moment précis que l’impétrant reçoit l’aide de celui qui baptise d’eau et qui a annoncé le baptême de feu, Saint Jean l’Evangéliste surnommé Boanerges (fils du tonnerre).(Mathieu 3.10-12)

Le bras protecteur évite la chute dans l’abime après avoir gravi la montagne. L’égoïsme est un guide trompeur alors que la fraternité et l’altruisme sont un phare salvateur.

 

Le premier voyage est l’emblème de la vie humaine : tumulte des passions, choc de divers intérêts, difficulté des entreprises, les obstacles qui sont multipliés sous nos pas par des concurrents empressés à nous nuire et toujours disposés à nous rebuter.

Il s'effectue dans le sens de la mesure du temps tout comme les déplacements en loge du maitre des cérémonies. Il est chaotique, difficile, heurté, malaisé dans un contexte d'obstacles terrestres et de déchainement de l'air qui va permettre la première purification. L’air se trouve être l'élément qui intervient au cours de ce premier voyage. La moindre progression au cours de celui ci n'est rendue possible que par l'aide et le secours de l'Homme : seul on est rien et on reste à l'arrêt dans son carcan de fausses certitudes. La sortie de cet environnement stérile n'est possible que grâce à la main tendue de la  fraternité. Ce premier voyage n'est-il pas également prémonitoire des difficultés que pourra rencontrer le futur apprenti dans son travail et son cheminement initiatique. La fraternité et le rituel l'aideront à surmonter les obstacles et à progresser.

 

Trois voyages et trois grades. Le premier peut donc correspondre à celui de l'apprenti et se déroule en l'absence du feu et de l'eau. L'apprenti travaillera au Nord, là où la lumière est faible. La purification par l’eau se déroulera au cours du second voyage et l’épreuve du feu interviendra pendant le troisième voyage. L’élément terre est lui logiquement présent  au cours des trois voyages rappelant notre condition humaine de mortel.

 

Les principaux voyages initiatiques légendaires racontés dans la littérature sont chronologiquement celui de Gilgamesh, celui d’Ulysse dans l’Odyssée d’ Homère et enfin celui d’Enée dans l’Enéide de Virgile.

Les grands voyages qu’ils soient historiques ou légendaires ne sont jamais des voyages d’agrément. Ils sont semés d’embûches, de difficultés, de peines et lorsque le héros ou les hommes arrivent à destination ils ne sont plus les mêmes qu’à leur départ. Nombreux sont ces héros dont les parcours ont été racontés en dehors des trois sus-cités :

(Thésée, Héraclès, Œdipe, Jason, Lancelot, Parsifal…)

Pour ce qui concerne plus précisément Enée il ne connaissait au départ ni sa mission, ni sa destination.

Il devra être initié pas à pas et surmonter des épreuves successives pour accéder à la gloire suprême de fonder la nation romaine. Pour accomplir cette mission il doit affronter sa peur de la mort et du royaume des enfers. Il s’agit d’une lutte contre lui-même pour se surpasser. Si le but du voyage d’Enée est la fondation de la nation romaine, il n’en demeure pas moins qu’il change, grandit, devient un homme capable non seulement d’affronter son destin mais aussi de l’accomplir en homme  libre qu’il est devenu en surmontant les épreuves et en s’affranchissant de sa peur.

 

Autre voyage que l’exode du peuple élu vers la terre promise et qui  ne se fait pas sans heurts et dont la destination finale apparaît géographiquement inaccessible.

Les voyages maritimes découvreurs de peuples et terres inconnus constituent également des parcours qui ont très vraisemblablement changé chaque homme ayant participé à ces expéditions.

Ces changements n’allaient malheureusement pas toujours dans le bon sens et n’ont pas forcément ouvert tous les esprits.

La longue histoire nomade de l’humanité n’est-elle pas un voyage sans fin depuis les mouvements de population dans le croissant fertile de la Mésopotamie jusqu’aux migrations humaines de notre temps provoqués par les conflits et les lois de l’économie ?

 

De nos jours les moyens de transport de plus en plus rapides, le culte des loisirs, la recherche de l’exotisme et l’ égoïsme sont autant de facteurs qui peuvent vider les voyages de leur sens profond et n’en faire que des séjours ou périples stériles dont les rapports humains sont absents. La disparition de cette ouverture de l’esprit et de l’âme envers l’homme peut aboutir à une acceptation molle et résignée de la misère et de la détresse humaine pouvant exister dans le superbe cadre naturel seul objet du désir de ce voyage.

 

Le voyage comporte t’il un terme ou existe t’il toujours une destination inaccessible ?

Le voyage spirituel idéal tel qu’il a été envisagé dans l’introduction possède vraisemblablement un terme qu’il faut s’efforcer par le travail d’approcher mais qui ne sera jamais complètement atteint. Nommer ce terme de façon univoque apparaît restrictif :

Perfection, Absolu, Inconnu peuvent être proposés avec la plus grande humilité.

 

J’ai dit Vénérable Maitre.
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