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 "Dieu est mort…"

On trouve au début du poème de Gérard de Nerval, "le Christ aux Oliviers", une citation signée Jean-Paul*, et qui, 60 ans au moins avant Nietzsche écrivait : "Dieu est mort! Le ciel est vide... Pleurez! Enfants, vous n'avez plus de père…"
C'est dire que l'angoisse de la vacuité des cieux hante l'imaginaire des hommes sans doute depuis toujours. Déjà, du côté de Babylone, il y a plus de 4000 ans, des prêtres savants scrutaient les astres afin d'y découvrir des réponses sur le destin du monde. Plus tard, nous verrons trois de leurs descendants chaldéens suivre une étoile plus brillante que les autres les conduire jusqu'à Bethléem. Et puis à partir de là, et certainement pour la première fois de l'histoire de l'humanité, Le Ciel de l'Ailleurs et de l'Omnipotence fit l'expérience de l'Humanité, vécut parmi nous, puis fut mis à mort et disparut durant 3 jours…
La mort de Dieu se pose ainsi comme l'un des fondements essentiels de la religion chrétienne, celle de l'humilité, de la proximité, de la Charité et de l'Espérance. Elle est donc devenue peu à peu la liturgie de "l'Après", spécialement des humbles et des oubliés, qui ne font qu'attendre la vraie vie posthume. Et la phrase christique : "Je leur ai fait don de ta parole, et le monde les a pris en haine parce qu'ils ne sont pas du monde, …." (Jn 17,14) devint le reproche constant, retenu au cours des siècles, pour condamner ou se méfier de cette religion, qui semble fuir la réalité du quotidien, et salue la mort comme une délivrance.
C'est en ce sens que s'inscrit au 19ème siècle la mort nietzschéenne de Dieu. Siècle ouvert à tous les possibles d'une science qui se veut enfin délivrée de toute référence confessionnelle, le 19ème triomphant sera celui de la mise en pratique des inventions nouvelles et de la "révolution industrielle" européenne, mécaniste, mercantile et colonisatrice. Les mythes du progrès et du scientisme ont remplacé "la vieille religion", et Copernic, Darwin et Freud infligèrent à la condition humaine ses "trois grandes blessures narcissiques" en reléguant l'homme dans la solitude de lui-même.
En 1915, il faudra rajouter Einstein et sa "relativité générale" à la liste de ceux qui changèrent notre vision du monde. Aussi, face au vide spirituel qui s'installe, faut-il rassasier les opinions publiques naissantes, les faire rêver d'exotisme et de bons sauvages, les détourner des souffrances quotidiennes qu'elles endurent dans les manufactures infernales, donner du sens à la misère qui s'organise en lutte des classes, et aller chercher, où elles se trouvent et par tous moyens, les matières premières indispensables au développement de l'industrie insatiable et dévoreuse d'hommes.
Subséquemment, la première guerre industrielle mondiale fit 9 millions de morts, et 25 ans plus tard, sans référence à Dieu, la science permettra, les 6 et 9 aout 1945 sur Hiroshima et Nagasaki, un bouquet nucléaire final à 60 millions de morts disparus dans la barbarie humaine. Les temps modernes de la production et de la consommation de masse étaient définitivement nés, avec, dans leur sillage, plus de 200 millions de morts en un siècle, victimes d'autres liturgies, d'autres commandements, d'autres idoles et d'autres adorations… de puissance et de domination. "Humain, trop humain"…!

* pseudonyme de Friedrich Richter mort en 1825
Où allons-nous ?

Parvenus au terme de ces huit étapes de l'aventure historique humaine depuis l'invention de l'écriture, une question s'offre presque naturellement à nous:
 
               L'Histoire a-t-elle un sens ?

Autrement dit, nous enseigne-t-elle peu à peu quelque chose sur nous-mêmes, ou qui puisse servir à l'organisation présente de nos Sociétés  Plus précisément encore, suit-elle une direction cohérente et intelligible, qui pourrait nous permettre de comprendre, sinon d'où nous venons, au moins vers quoi tend l'Humanité ?


Si l'on reste sur le registre purement événementiel, il est évident que la réponse à cette question semble se contenter d'une simple négation puisque, tout compte fait, nous avons vu que l'Histoire ne fait qu'écrire différemment des histoires toujours semblables, de paix, d'inventions et de massacres...
En revanche, à en croire certains adeptes de l'évolution de la pensée humaine, il semblerait bien que nous distinguions, au moins sur la longue période de l'histoire écrite, une forme de progression suivant un dessein divin pour les uns, ou un finalisme naturel, plus ou moins de hasard, pour les autres. C'est ainsi que nous serions passés de l'âge de l'enfance théologique du Mythe, à celui de la maturation des abstractions positivistes de la Science laïque.
En fait, il semble bien que ce ne soit encore qu'une illusion supplémentaire confondant tout à la fois technologie, religion, philosophie et mentalités contextuelles. Car, la véritable évolution des sociétés est assujettie à de multiples facteurs, parmi lesquels les faveurs ou non du climat et de la géographie sont des données primordiales. En effet, à partir de ces deux éléments, des migrations ou des sédentarisations s'opèrent, qui entraînent alors des mises en œuvre de technologies différenciées. C'est notamment ce qui semble être advenu il y a quelques 10 ou 12000 ans entre l'Indus et la Mésopotamie. Or, rien ne se créant de rien ici-bas, la progression résulte sans cesse de croisements, d'échanges, de compétitions, d'affrontements, de coopérations et de coups de génie entre divers peuples et territoires, permettant d'obtenir, en aval, des innovations à partir des techniques ou des concepts déjà entrevus ou mis en œuvre en amont. Il s'agit là d'une sorte de marche quasi irréversible d'un "progrès inarrêtable", qui conduit nécessairement de l'âge de la pierre taillée à celui du fer, et non l'inverse. Il a fallu l'arquebuse, pour qu'existe la Kalachnikov… C'est, d'une certaine manière ce que nous raconte objectivement l'actuelle Science de l'Univers, nous menant de la Soupe primordiale cachée derrière le "mur de Planck" à un temps scientifico-mythique de 10-43 sec, jusqu'à l'émergence d'une forme de pensée capable de s'interroger sur sa propre origine et d'aller explorer les lointains de son berceau. Ainsi va l'histoire réelle de l'Homme, dont les philosophies et les civilisations seront, paradoxalement, toujours celles de son outillage, c'est-à-dire de sa main.
Dès lors son Histoire est-elle ce qu'il en fait.
C'est ce que nous raconte sans cesse les témoignages qu'il laisse derrière lui. Nous le voyons dessinant ses mains et des signes mystérieux sur les parois des grottes, laissant des traces sur des tablettes d'argile, écrivant ses pensées dans la cire, et dactylographier aujourd'hui sur un ordinateur, pour se poser chaque fois la sempiternelle et lancinante question, "qui suis-je?". Question à laquelle, depuis l'âge des mythes et des cavernes, jusqu'à notre positivisme le plus orgueilleux, nous ne répondons, toujours, que par un abyssal et majuscule point d'interrogation.

V:.M:. Al Ecker
Résumé de la neuvième partie des Racines du Ciel - Tous droits réservés - 2009
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